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[WE MEDIA] Distribution de la presse après 2026 : Omnicanal avec le print en tête de liste

[WE MEDIA] Distribution de la presse après 2026 : Omnicanal avec le print en tête de liste

Il n’y a pas si longtemps, les éditeurs envoyaient systématiquement chaque numéro de leurs précieux magazines par la poste à leurs fidèles abonnés. Cette époque est révolue. Aujourd’hui, pour atteindre sa communauté, il faut tenir compte de facteurs tels que le coût élevé de la distribution et la fragmentation de l’audience. Les éditeurs avisés ont donc besoin d’une distribution optimisée et de multiples canaux de diffusion. L’imprimé reste toutefois essentiel. Contexte et perspectives par Ineke Le Compte (Directrice Commerciale de BRUZZ) et Bernard Cools (Chief Intelligence Officer chez Space).

Traditionnellement, les éditeurs de magazines atteignaient leurs groupes cibles par le biais de ventes au numéro et d’abonnements, avec l’imprimé comme pivot. Ce modèle a fondamentalement changé ces dernières années, notamment en raison du coût croissant du papier et de la distribution. Comment gérez-vous cela ?

Ineke Le Compte : Le cas de BRUZZ est bien sûr particulier, car en tant que plateforme de et pour la communauté flamande à Bruxelles, nous tirons une grande partie de nos ressources de subventions. La majeure partie de nos ressources ne provient donc pas directement du marché des lecteurs. Mais le fait que l’imprimé soit confronté à un certain nombre de défis est également vrai pour nous.

C’est notamment pour cette raison que la marque BRUZZ comprend aujourd’hui toute une gamme de canaux différents pour atteindre les Bruxellois et les personnes intéressées par la ville : un magazine papier hebdomadaire, mais aussi un site web avec des actualités et des conseils culturels, une radio analogique et numérique, une télévision, une plateforme pour les jeunes et des réseaux sociaux.

Selon les derniers chiffres du CIM, le magazine touche environ 103.000 lecteurs par semaine, avec un tirage d’environ 50.000 exemplaires, dont un peu moins de 20.000 sont distribués gratuitement dans différents points de distribution, tels que les stations de métro, les institutions publiques, les musées et les magasins. Le reste est envoyé à nos plus de 30.000 abonnés à Bruxelles et en dehors. Pour les Bruxellois, l’abonnement est aujourd’hui gratuit, les autres paient 29 euros par an.

Plus de la moitié de votre tirage est donc envoyé par la poste. La fin annoncée des aides publiques à la distribution de la presse risque donc d’avoir un impact sérieux sur votre budget.

Ineke Le Compte : Aujourd’hui et jusqu’à la fin de l’année prochaine, nous recevons une compensation de la part des autorités pour les frais supplémentaires (crédit d’impôt) liés à la distribution de nos magazines à nos abonnés depuis la fin de la concession (avec bpost). Mais cela prendra fin le 1er janvier 2027.

Que comptez-vous faire ?

Ineke Le Compte : Réfléchir très sérieusement à la manière dont nous pouvons résoudre ce problème et formuler soigneusement nos options dans le nouveau plan stratégique que nous élaborons actuellement (rires).

L’une des pistes serait de renverser notre modèle de distribution, c’est-à-dire de distribuer la majeure partie des exemplaires via la vente au numéro et une minorité via des abonnements, par exemple pour les groupes cibles moins mobiles.

Nous pourrions également envisager de répercuter ces frais de distribution supplémentaires sur le prix de l’abonnement, même si nous préférerions éviter cela.

Bernard Cools : Il est évident que la suppression des subventions à la distribution de la presse fera grimper le prix de l’abonnement, ce qui pourrait inciter les abonnés à se désabonner. On le constate déjà chez les éditeurs de journaux. De plus, les alternatives à bpost ne sont pas vraiment de la même qualité.

Ineke Le Compte : C’est vrai, et en outre, compte tenu de notre mission de service public, nous avons aussi nos normes et nos valeurs. Je veux dire par là que nous voulons et devons être prudents avec les constructions de sous-traitance, car on ne dispose pas nécessairement des garanties nécessaires concernant les conditions contractuelles des travailleurs concernés.

Est-il envisageable de passer d’un modèle imprimé à un modèle purement numérique ? Cela permettrait de supprimer les coûts de distribution.

Bernard Cools : En théorie, cela serait possible. Mais si la consommation numérique est très bien implantée dans la presse quotidienne, c’est beaucoup moins le cas pour les magazines. Si l’on examine les derniers chiffres du CIM (datant de 2024), on constate que la consommation numérique reste limitée à 2 à 3 % en moyenne. C’est très peu.

La forte progression de la vidéo en ligne pourrait-elle stimuler la consommation de magazines numériques ?

Bernard Cools : Peut-être, mais cela exercerait une pression énorme sur les rédactions, qui devraient alors produire des images en plus de leur contenu écrit, ce pour quoi elles ne sont pas nécessairement formées ni équipées. À quelques exceptions près, la plupart des magazines fonctionnent avec des équipes très réduites. Quoi qu’il en soit, le papier reste très important dans la presse magazine.

Ineke Le Compte : C’est également le cas chez BRUZZ, même si nous disposons d’une large gamme de canaux. Nous pensons que le magazine est un élément fondamental de notre modèle, même si tout ce que nous y publions est également disponible sur le site. Le papier est tangible, moins éphémère et a une durée de vie plus longue, comme vous pouvez le constater en regardant la pile sur mon bureau. Le magazine obtient d’ailleurs des scores remarquablement élevés dans l’enquête de satisfaction que nous menons : nous ressentons clairement un fort engagement des lecteurs envers le magazine.

Indépendamment de cela, je suis également convaincue que le papier offre une valeur ajoutée en cette période de changement, avec un monde en ligne dominé par l’IA et les fake news, qui entraîne une baisse de la fiabilité. Ce n’est pas le cas avec l’imprimé.

Bernard Cools : À cet égard, je pense que l’une des principales missions du gouvernement et des éditeurs consiste à transmettre aux jeunes générations une culture médiatique et à leur donner envie de regarder au-delà de leur écran.

On dit parfois que le papier deviendra un produit de luxe, mais si l’on y réfléchit bien, il s’agit en fait davantage d’un produit de base qui trouve parfaitement sa place dans un modèle économique contemporain.

Bernard Cools : Tout à fait. Auparavant, le modèle économique des éditeurs reposait sur deux piliers : le marché publicitaire et le marché des lecteurs. Comme ces deux piliers sont sous pression, les éditeurs doivent se diversifier : aujourd’hui, d’autres sources de revenus sont apparues, telles que le sponsoring, le marketing de contenu, les événements, le commerce électronique et même la commercialisation des données. Le poids des abonnements a donc diminué proportionnellement, mais ils restent essentiels dans l’offre omnicanale d’un éditeur.

À cet égard, je voudrais d’ailleurs faire une remarque et exhorter les éditeurs à examiner attentivement la pertinence de chaque canal et de chaque plateforme dans leur gamme de contenus, afin d’éviter une offre excédentaire. C’est également un facteur qui peut jouer un rôle dans un modèle commercial équilibré.

Que peut faire une fédération telle que WE MEDIA pour vous aider dans ce domaine ?

Ineke Le Compte : Je trouve qu’ils font déjà beaucoup, en nous fournissant des informations que tout le monde ne trouverait pas facilement ailleurs. Je fais moi-même partie du groupe de travail sur la distribution de WE MEDIA, où nous essayons d’unir nos forces pour réfléchir à tous les aspects de la distribution de la presse (via des abonnements mais aussi via la vente au numéro) auxquels nous sommes confrontés en tant qu’éditeurs.

Dans ce contexte, WE MEDIA organise le 23 septembre une session d’information spéciale pour ses membres (et les éditeurs en général). Elle sera consacrée aux développements logistiques, à la baisse des tirages et/ou des publications, aux nouveaux modèles commerciaux, etc., et posera la question de savoir s’il est temps de faire le point avec bpost et AMP sur ce qui est possible, rentable et envisageable pour renforcer la distribution en général.

Source : WE MEDIA.

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